Ferias de Mont de Marsan
« J’irais de Pampelune jusqu’à Bayonne, j’irais de Dax
jusqu'à Mont de Marsan, je ferais le plus grand pèlerinage des festayos de tous
les temps ».
La chanson résonne dans ma tête durant tout le trajet, et
j’ai envie de la hurler dans le train qui me mène jusqu’à Mont de Marsan. Car
il faut dire que la motiv' est la : les ferias, j’en ai entendu parler il
y a deux ans par mon prof d’histoire de terminale (le très sympathique Mr
Launay) et l’envie d’y aller ne m’a jamais quittée depuis.
Et aujourd’hui, grâce à Alex qui est originaire de la bas,
je vais me mettre la mine du siècle avec les Landais, qui font partie de l'élite de l'éthylique!!!
Arrivé chez la grand mère de mon compagnon de fiesta, je comprends que ce week-end-end va être terrible : grande ferme, ciel bleu, gens sympathiques, lit moelleux et une Mamie Yoyo qui nous fait des plats aussi délicieux que gargantuesques !
Après un énorme gueuleton et une sieste au soleil, Alex et moi partons fièrement vers Mont de Marsan, vêtus de notre uniforme de feria : T-shirt blanc et bandana rouge !
On s’imprègne de l’ambiance le temps de faire quelques manèges avec les p’tites cousines (et de me faire pickpocketter 15 euros) puis on passe aux choses sérieuses : direction la Rue Jaune!
Et à partir de là je vit de mes propres yeux ce qui m’avait déjà été décrit : déguisements d’alcoolos, rugbymen bourrés qui emportent dix personnes avec eux quand ils s’écroulent, filles qui dégueulent en public, mecs a poil qui dansent sur les comptoirs de bodega, rue entières dédiées à la pisse, fanfares, Paquito, surfeur qui parcoure les rivières d’urines sur sa planche en plastique… et j’en passe !
Un combat acharné, voir épique, contre le coma éthylique qui
prit fin à 4 heures du matin lorsque nous nous dirigeâmes vers le dernier bus,
d’un pas et d’un regard vaillant que seuls les soldats de la tise peuvent
avoir, enjambant les corps inanimés des soldats sacrifiés, traversant les
rivières de pisse, escaladant les montagnes de bouteilles vides… défiant du
regard les autres combattants dont le bandana de couleur indiquait
l’appartenance, et exhibant fièrement nos vêtements blancs tachés d’une couleur
rouge témoignant de notre lutte sangriesque.
Un dernier regard vers ce champ de bataille et direction le
lit… tout habillé, le visage collant (conséquence d’une karcherisation de
Vodka-Redbull soigneusement orchestrée par un individu équipé d’un tonneau), il
faut vite dormir car demain ça sera pire…
Et ce fut pire !
Car c’est le samedi que le taux de participation
explose !
Bouteilles de sangria et de vodka en main (que nous n’avons
pas payé… vive les commerçants des Landes !) nous nous dirigeons
vers la ville.
Et c’est en arrivant à Mont de Marsan que je LA vit !
Elle était sur le trottoir d’en face, éblouissante, resplendissante, ses
couleurs vives ressortaient parfaitement au milieu des lueurs féeriques de
cette petite rue Montoise : j’ai immédiatement été séduit par cette
magnifique perruque multicolore en forme de crête !
Mis en vente à huit euros, négocié à quatre, cet objet
ridicule m’a amené à rencontrer plus de filles que mon costard Hugo Boss à 1000
euros ! C’est l’investissement le plus rentable de mon existence, Alex
pourra en témoigner…
Inutile de décrire l'ambiance de la soirée: vous prenez l'explication de la veille et vous imaginez la même chose avec trois fois plus de monde... pas sur que vous réalisiez bien l'ampleur de la chose!
Le seul hic de la soirée fut l'atomisation de mon appareil photo neuf (une semaine) sur le sol Montois... j'ai compris depuis qu'amener un appareil photo à une feria est aussi judicieux qu'organiser une course à dos d'éléphant dans un magasin de porcelaine.
Privé de mon appareil photo, je décide de m'acheter un mégaphone. Vendu 15€, négocié à 8 et une clope (j'ai pas fait prépa HEC pour rien), ce magnifique instrument amplifie la voix, enregistre des sons, et fait "Oléoléolé": tout pour me rendre heureux.
Et toujours équipé de ma perruque je parcoure les rues en hurlant toutes les phrases qui me passent par la tête, on retiendra notamment: "Soooldats de la tise, matricule 1664 attendu pour l'opération chouille" (très fin); "L'alcool est un ennemi, celui qui fuit l'ennemi est un LACHE" ou encore "Alex!!!! CARAMBAR droit devant" (Carambar étant le mot de code voulant dire "téma la bonasse qui passe").
A Paris on m'aurait enfermé pour moins que ça, mais ici je passe presque inaperçu malgré la couleur rouge sangria de mon T-shirt. Il faut dire qu'il est dur de rivaliser avec les travestis ou la vache qui joue de la guitare électrique, à moins que les effluves d'urines (au bout de trois jours on commence a sentir ça partout) ralentissent le cerveau des gens.
Je me suis calmé lorsqu'on a croisé deux charmantes demoiselles (Émilie et Emmanuelle) qui partageaient ma passion pour le mégaphone, et avec qui nous avons passé la fin de la soirée sur la place principal avant de rejoindre Mamie Yoyo qui nous attendait en voiture à cinq heures du matin.
Puis se fut le réveil (douloureux) et le départ... la fin d'une aventure, les promesses de ne plus jamais toucher une goutte d'alcool (et cette fois ci c'est pour de bon), le doliprane, les bagages, le dernier repas, les adieux au monde de la fête.
La fin? Pas vraiment... à la gare on croise un sympathique militaire qui s'apprêtait à fêter ses 20 piges, alors dans le TGV on décide d'arroser ça d'une bière, puis deux, puis trois... et on a ressorti les T-shirt de ferias, les bandanas, la perruque, le mégaphone afin de faire partager notre joie de vivre aux sympathiques voyageurs de la SNCF!!! Ils n'avaient pas l'air très emballés... mais toutefois, d'après une RATPienne, on était moins pire que les supporters Toulousains qui s'étaient mis à poil dans le wagon bar.
L'arrivée à Paris est joyeuse, mon mégaphone crache dans la gare Montparnasse "Je m'appelle David, j'ai 20 ans, j'ai besoin d'argent pour me payer de la bière, du cannabis et un ticket de métro, auriez vous une petite pièce pour m'aider". Mais comme le franc parler ne paye pas, je suis obligé de frauder dans le métro pour enfin arriver dans ma chambre et mon doux lit.
La je me met à lire tous les messages laissés au marqueur sur mon T-shirt, alors il y a: 3 adresses MSN, deux numéros de téléphone, 60cm² de sangria, "Matricule 1664, soldat de la tease", "Tu es charmante", "Je ne sais pas écrire", "Gros bisoux de Manue", "Gros bisouxxx lily!!!", "Bonne fête de la Madeleine", "(illisible cause sangria) David bisouxx 44", "Chouille Team", "Alors ta choppé?", "La grosse bite à Dudule" (et le dessin qui va avec), "A toi cher compagnon de Heineken, Bonne feria!!" (signature illisible cause sangria), "Je suis une chatte!!!!", "Ferias de Mont de Marsan 2008, souviens toi tu n'étais pas bien!" ainsi que plusieurs dessins phalliques et autres.
Bon, cette fois ci c'est vraiment la fin, je vais aller dormir, me lever demain matin, aller bosser pour gagner des sous... mais une chose est sure: l'an prochain j’irais de Pampelune jusqu’à Bayonne, j’irais de Dax jusqu'à Mont de Marsan, je ferais le plus grand pèlerinage des festayos de tous les temps!